Grokipedia d’Elon Musk : Une « anti-Wikipédia » à la sauce IA… ou un miroir déformant ?

Ah, Elon Musk ! Le genre de personnage qui ne fait jamais les choses à moitié, n’est-ce pas ? Chaque fois qu’il lance un nouveau projet, c’est avec un bruit de tambours et la promesse de révolutionner un domaine. Cette fois-ci, c’est le monde de l’information et des encyclopédies qu’il a dans le viseur, avec le lancement récent de Grokipedia, sa version IA d’une « anti-Wikipédia ».

L’idée est simple, en apparence : corriger les « erreurs et biais » que Musk reproche à Wikipédia, jugée trop à gauche et « woke » à son goût. Un terrain de jeu idéal pour l’IA, censée garantir une neutralité exemplaire. Mais comme souvent avec les promesses de Big Tech, la réalité sur le terrain révèle quelques zones d’ombre, et même de franches bizarreries. Accrochez-vous, car on va décortiquer ensemble les premières pages de cette nouvelle bête de l’information.

🚀 L’ambition d’Elon : une encyclopédie “anti-woke”

Derrière Grokipedia se cache xAI, la société d’intelligence artificielle de Musk. La version 0.1, lancée fin octobre 2025, est arrivée avec près de 885 000 articles. C’est déjà pas mal, mais encore loin des dix millions de Wikipédia. Le pitch ? Utiliser l’IA pour analyser, réécrire et contextualiser l’information, afin d’offrir une vision plus équilibrée. Musk n’a pas mâché ses mots sur X (anciennement Twitter), affirmant que cette première mouture était déjà « meilleure que Wikipédia », et que la v1.0 serait « 10 fois mieux ».

Sur le papier, c’est alléchant. Qui n’a jamais rêvé d’une source d’information objective, débarrassée des opinions ? Sauf que… le diable est souvent dans les détails, surtout quand il s’agit de définir ce qu’est une opinion ou un “biais”. Et sur Grokipedia, ces détails sautent aux yeux.

🔍 Premiers pas, premières polémiques

Dès les premiers clics, un détail frappe : l’interface. En dehors d’un mode sombre bienvenu, elle ressemble comme deux gouttes d’eau à celle de Wikipédia. Un peu ironique quand on connaît la croisade anti-Wikipédia de Musk. Mais le vrai problème ne se trouve pas là. Non, il est dans le contenu. Très vite, des utilisateurs ont pointé du doigt une tendance étrange : Grokipedia semble faire le grand ménage sur les pages de certaines personnalités, en particulier celles alignées avec les idées de son créateur ou de la droite alternative américaine.

La version 0.1 était déjà « meilleure que Wikipédia », et la version 1.0 sera « 10 fois mieux ».

⚖️ Ces biographies un peu trop lissées…

Prenons Donald Trump, par exemple. Sa page Wikipédia regorge de détails sur ses démêlés judiciaires, ses accusations de toutes sortes. Sur Grokipedia ? C’est une tout autre histoire. L’affaire Stormy Daniels, où Trump a été reconnu coupable de falsification de documents, est présentée sous un jour atténué, avec un accent mis sur la « nouvelle théorie juridique » et le « manque de précédent ». La portée historique de ce procès, le premier pour un ancien président américain, passe à la trappe. On dirait un agent de com’ ayant eu un peu trop la main lourde sur le polish.

Même son de cloche pour J.K. Rowling, l’autrice d’Harry Potter. Ses positions très critiquées sur les questions transgenres sont retranscrites avec des pincettes dignes d’un chirurgien. Elle y est décrite comme une « défenseure du caractère immuable du sexe biologique et de la protection des droits des femmes ». Les accusations de transphobie sont mentionnées, mais aussitôt atténuées par une phrase sur son soutien aux droits des personnes trans à vivre sans discrimination. Un numéro d’équilibriste éditorial qui frise le déni.

Et Robert F. Kennedy Jr. ? Ses liens avec le complotisme antivax sont, eux aussi, étonnamment absents ou minimisés sur sa page Grokipedia. Le « lissage » est une constante, donnant l’impression que Grokipedia ne corrige pas un biais, mais en introduit un autre, inversé.

🔄 Un air de déjà-vu ? Grokipedia et l’ombre de Wikipédia

Le plus déroutant, c’est que Grokipedia ne se contente pas de ressembler à Wikipédia en termes d’interface. Plusieurs observateurs ont remarqué des similitudes frappantes dans les structures, les chronologies, et parfois même des paragraphes entiers, sans reformulation apparente. La page d’Albert Einstein, par exemple, est presque un copié-collé de sa cousine wikipédienne.

Et là, surprise ! En bas de certaines pages Grokipedia, on trouve un petit disclaimer : « Le contenu est adapté de Wikipédia, sous licence Creative Commons Attribution – Partage dans les Mêmes Conditions 4.0 ». Attendez une minute… On critique Wikipédia pour ses biais, pour au final en copier le contenu, avec un léger lifting éditorial et des angles un peu différents ? C’est comme critiquer un plat au restaurant et ensuite aller en cuisine pour en “adapter” la recette avec ses propres épices, en gardant tous les ingrédients de base.

🤔 La “vérification” made in Grok : un mystère

En haut des articles Grokipedia, on lit fièrement « vérifié par Grok » avec une date et une heure. Cela devrait nous rassurer, non ? Mais étant donné la polémique sur les biais de l’IA de Musk et le manque de transparence du processus, cette mention soulève plus de questions qu’elle n’apporte de réponses. Comment cette “vérification” est-elle effectuée ? Sur quelles bases ? Quels sont les algorithmes en jeu ? Mystère et boule de gomme.

Contrairement à Wikipédia, les utilisateurs ne peuvent pas modifier les pages. L’historique des changements est également opaque. Cela signifie que l’information est présentée comme une vérité absolue, sans possibilité de débat ou de correction collective. Un modèle à l’opposé de la philosophie collaborative qui a fait le succès de Wikipédia.

💡 Mon avis : Entre promesse et réalité

Grokipedia est un projet ambitieux, c’est indéniable. L’idée d’utiliser l’IA pour créer une encyclopédie est fascinante. Mais la v0.1 que nous avons sous les yeux ressemble plus à une réécriture partisane qu’à une quête objective de la vérité. Le “anti-woke” promis se transforme en un “pro-certaines-idées” qui n’est guère plus neutre. En fait, il introduit un nouveau filtre de lecture, peut-être tout aussi problématique que celui qu’il prétend corriger.

L’information est un bien précieux, et à l’ère de l’IA, le défi de la neutralité est plus pertinent que jamais. Grokipedia, dans sa version actuelle, nous rappelle qu’un outil, aussi puissant soit-il, ne vaut que par les mains qui le dirigent et les intentions qui le sous-tendent. On attendra la version 1.0, bien sûr, mais pour l’instant, mon réflexe reste de vérifier mes sources… y compris Grokipedia.